PAILLASSE (à tous les deux )
Allons ! allons !
JOCRISSE ( se tournant vers Paillasse )
Eh bien ! je vais poursuivre
Je suis tout comme vous et j'ai l'esprit ivre
De tous ces grands problèmes qui nous touchent de près
Pour lesquels on doit avec du doigté
En expliquer l'essence avec habileté
Tout en oubliant pas la sainte probité.
Aussi pour être franc, je dirai simplement
Que l'impossible est fait pour que l'étalement
Des prix soit assuré avec commodité
Afin que cela aide tous les intéressés.
PASQUIN
Autrement dit les pauvres, le mot n'est pas trop fort.
JOCRISSE ( avec gestes )
L'essentiel c'est de voir l'incomparable effort
Fourni par tous ces hommes en vue d'égaliser
Le salaire des français dans notre société.
PASQUIN
Mais pensez-vous vraiment que ce peu de monnaie
Assure à ces derniers de quoi ne pas crever !
PAILLASSE
Le mot n'est pas trop fort et tombe avec passion
Au milieu du carcan où n'est plus la raison.
Oui Messieurs, il faut voir avec simplicité
Ce que montrent les faits. Ce n'est pas un pêché
Que de dire tout haut ce qu'on pense de vous.
MAYEUX ( énervé, avec gestes )
( Plan d'un caméraman )
Ah! quel ton enflammé ! mais regardez partout !
PAILLASSE ( derechef )
Mais c'est que plus je regarde, je vois la vie
Bien triste. Et demain elle sera bien pis.
Car défendue par vous, je ne crois guère en elle,
Ce sera la misère, la fin de la pucelle,
Symbole de la gloire et de la liberté.
La France ne sera plus qu'un vil tas de fumier.
Je ne veux pas voir ça et combattrai toujours
L'ennemi de la France et de ses mauvais jours.
MAYEUX
Cela est fort bien dit et je vois avec joie
Que vous êtes Monsieur patriote comme moi.
À l'inverse de vous j'ai confiance aujourd'hui
En ces hommes d'action desquels je fais partie.
PASQUIN ( à Mayeux )
Taisez-vous ! pensez aux choses que vous dites !
Vous venez me prêcher un pouvoir tyrannique.
Songez que j'ai souffert et que je souffre encore
De voir céans des hommes insister avec tort
Sur tout ce dont la France n'a nullement besoin
À savoir les parades ainsi que du crottin.
MAYEUX
Mais vous êtes bornés! Et il ne faut jamais
Être aussi véhément tant qu'on a pas goûté…
PAILLASSE ( avec mimiques )
( Plan d'un caméraman )
À quelques billets doux glissés par gentillesse
Pour paroles tenues ainsi que des promesses.
Cela est fort connu, vous nous apprenez rien
Mais avouez quand même que ça vous fait du bien.
MAYEUX ( haussant les épaules )
Je n'entends rien du tout à ce que vous prêtez
Comme étant le sujet de mon humble métier
Oui ! je défends ces hommes car ils ont du courage
Pour se battre avec force sans avoir fait naufrage.
PAILLASSE
Et moi je considère cela comme un outrage
Car ils jouissent fort bien de tous les avantages
Pris sur le dos de ceux qui tous les jours meurent
En suant au travail, en mettant tout leur cœur
Croyant ainsi gagner un salaire meilleur.